IDA LUPINO CINÉASTE AVANT-GARDISTE

Jean-Yves Henry

Bernard Benoliel – Ouverture *Rétrospective Ida Lupino* – Cinémathèque Française – 16 juillet 2025

IDA LUPINO (1918 – 1995)

Anglaise issue d’une longue lignée de comédiens italiens, d’abord actrice dans les années 1940, ses débuts dans les films britanniques de la Warner ne reflètent toutefois pas l’étendue de son talent, forgé à la Royal Academy of Dramatic Art. Elle est envoyée à Hollywood par la Paramount où elle est sous contrat pour préparer Alice au pays des merveilles (Norman Z. McLeod).

De 1940 à 1947, elle hérite des seconds choix de la star de la Warner se qualifiant de « Bette Davis du pauvre ». Passant derrière la caméra, elle réalise quelques séquences sans être jamais créditée, jusqu’en 1949. Avec Collier Young, producteur et mari, elle crée The Filmakers, sa société de production. Produire, écrire et tourner en indépendante, impose un budget réduit mais laisse aussi place au succès.

Elle est longtemps restée l’unique femme membre de la Directors Guild of America, parmi ses 900 confrères, qui commençait ses sessions avec ces mots : “Gentlemen and Miss Lupino”. C’est dire la singularité d’Ida Lupino, actrice de caractère qui s’opposa régulièrement aux moguls de Hollywood, et força le destin en réussissant ce que seule Dorothy Arzner était parvenue à faire avant elle : passer derrière la caméra.

Le Voyage de la peur - 1953 - Ida Lupino — *Le Voyage de la peur* – 1953 – Ida Lupino

Si son unique thriller l’étonnant Le Voyage de la peur marque les esprits, ce sont ses formidables portraits de femme qui font d’elle une cinéaste à nulle autre pareille. Notamment dans Outrage – 1950, l’un des premiers films à aborder les séquelles d’un viol montrant le traumatisme de la victime et la façon dont elle intériorise la honte et la culpabilité, dans l’Amérique puritaine de l’après-guerre.

Ida Lupino, cinéaste indépendante dans l’Hollywood des années 1950 qui racontait les histoires qu’elle voulait. Dont les personnages féminins sont à l’opposé des icônes glamour et des femmes fatales.

Immergez-vous jusqu’au confins de l’été 2025 de la Cinémathèque française dans l’œuvre de la prolifique cinéaste Ida Lupino, très grande réalisatrice, scénariste, et productrice américaine. Morte en 1995 sans jamais avoir été célébrée, ni même interviewée.

A la Cinémathèque française pour sa rétrospective. Avec en ouverture The Bigamist – 1953, version restaurée.

The Bigamiste -1953 - Ida Lupino — *The Bigamist*

The Bigamist – 1953 – Ida Lupino

Version restaurée

Etats – Unis – 83 min

D’après une histoire de Larry Marcus, Lou Schor

Avec : Phyllis Martin : Ida Lupino, Harry Graham / Harrison Graham : Edmond O’Brien, Eve Graham : Joan Fontaine

La double vie de Harry Graham dévoilée, lorsqu’il s’engage dans une procédure d’adoption avec sa première femme. Edmond O’Brien incarne un homme fragile, d’une sensibilité rare dans le cinéma hollywoodien. Moins lâche que pris au piège de ses sentiments face à une Joan Fontaine à la froideur trompeuse. Celle-ci complète l’excellent trio, comme dans un jeu troublant avec la réalité, puisqu’elle vient d’épouser Collier Young, fraîchement divorcé d’Ida Lupino.

Un film à voir !